Depuis le 1er août 2025, les gestionnaires de réseaux électriques (GRD) tels qu’Enedis, appliquent le nouveau mécanisme de réajustement automatique des puissances de raccordement pour les clients en moyenne (HTA) et haute tension (HTB).
Issu de l’ordonnance du 23 août 2023, complétée par l’arrêté du 24 novembre 2024 et la délibération CRE n° 2024-229 du 18 décembre 2024, ce nouveau dispositif vise à rendre l’accès au réseau électrique plus efficace et équitable, dans un contexte de forte tension sur les capacités disponibles et d’accélération de l’électrification des usages (électrification des procédés industriels, data centers, infrastructures de recharge liés à la mobilité électrique, hydrogène bas-carbone).
Comprendre la réforme des puissances de raccordement
La CRE a constaté que, dans de nombreux cas, la puissance de raccordement réservée par les entreprises excédait largement les puissances effectivement soutirées : en moyenne, moins de 50 % des puissances contractualisées étaient utilisées.
Cette situation limitait la disponibilité du réseau pour de nouveaux entrants, tout en maintenant artificiellement des droits de raccordement inemployés.
La réforme introduit donc :
- La possibilité pour Enedis (et les GRD/transporteurs) de réduire automatiquement les puissances de raccordement surdimensionnées,
- Un cadre contractuel standardisé applicable aux nouvelles demandes de raccordement et aux augmentations futures.
Ainsi, le réajustement vise ainsi un double objectif : réallouer plus efficacement les capacités disponibles, en alignant les puissances contractuelles sur les usages réels et responsabiliser les consommateurs, en les incitant à dimensionner leurs besoins de façon dynamique et réaliste, plutôt que de figer une puissance surdimensionnée et sous-utilisée.
Le dispositif cible l’ensemble des consommateurs raccordés en moyenne (HTA) et haute tension (HTB), incluant :
- Les sites industriels électro-intensifs ou semi-intensifs,
- Les collectivités exploitant des infrastructures structurantes,
- Les data centers, dont la montée en puissance est souvent progressive,
- Les opérateurs d’infrastructures de recharge de véhicules électriques et, plus largement, tout acteur nécessitant une puissance contractualisée importante.
Les nouvelles règles de calcul de puissance de raccordement
À partir du 1er août 2025, la puissance de raccordement ajustée (Pracc_ajustée) du consommateur est recalculée selon la formule suivante :
Pracc_ajustée = min (Pracc_en_vigueur, Pmax_5ans × 1,25)
- Pracc_ajustée = min (Pracc_en_vigueur, Pmax_5ans × 1,25)
- Pracc_en vigueur : puissance de raccordement actuelle.
- Pmax_5ans : puissance maximale atteinte sur les cinq dernières années.
- + 25 % : marge de sécurité intégrée.
Ainsi, la nouvelle puissance de raccordement (Pracc_ajustée), est égale à la valeur la plus faible entre la puissance de raccordement actuelle (Pracc_en vigueur) et la puissance maximale soutirée sur les 5 dernières années calendaires (Pmax_5ans) majorée de 25 % (marge de sécurité).
Note :
- Pour les sites déjà raccordés avant le 1er janvier 2020 et dont la puissance de raccordement n’a pas évolué depuis cette date, Enedis ou le GRD recalcule leur puissance de raccordement en vigueur et l’ajuste éventuellement à la baisse selon le mécanisme délibéré par la CRE.
- Pour les sites ayant été raccordés après le 1er janvier 2020 ou dont la puissance de raccordement a évolué depuis cette date, le premier ajustement interviendra à l’issue d’une période de 5 années calendaires pleines à compter de la Mise A Disposition (MAD) de leur nouvelle puissance de raccordement.
En résumé, le recalcul du nouveau mécanisme de réajustement des puissances de raccordement s’applique :
- Dès 2025 pour les sites raccordés avant le 1er janvier 2020 sans modification depuis,
- Après cinq années pleines pour les raccordements plus récents ou ayant évolué.
- Le calcul sera reconduit au début de chaque année calendaire. Les résultats sont communiqués via l’espace client Enedis ou par l’intermédiaire du fournisseur s’il en fait la demande.
Une réforme qui impacte les entreprises
1. Réduction automatique des puissances :
Depuis le 1er août 2025, les sites dont la puissance souscrite est surdimensionnée sont mécaniquement réajustés à la baisse. Cet abaissement peut entraîner un risque opérationnel pour les entreprises projetant une croissance rapide ou l’électrification de leurs process industriels, si ces besoins n’ont pas été anticipés.
2. Régime d’indemnisation des augmentations de puissance limité dans le temps :
Toute demande d’augmentation de puissance nécessitant une adaptation du raccordement est désormais traitée comme un nouveau raccordement au réseau de distribution, avec des coûts associés à la charge du consommateur.
Cependant, un régime transitoire d’indemnisation a été prévu :
- Clients raccordés avant le 1er août 2025 : lors de la première augmentation de puissance postérieure à la date de raccordement, les clients pourront bénéficier d’une indemnité couvrant jusqu’à 60 % des coûts de travaux (après réfaction), dans la limite de leur puissance initiale.
- Clients raccordés après le 1er août 2025 : aucune indemnisation n’est prévue, ce qui renforce l’importance d’une projection précise dès la phase de contractualisation.
3. Possibilité de contracter une montée en charge progressive (10 ans) :
La délibération de la CRE introduit une innovation importante : la possibilité de contractualiser une trajectoire de montée en charge progressive de sa puissance sur dix ans.
- Le client définit trois paliers de puissance intermédiaires répartis sur quatre jalons de 2 à 3 ans.
- À chaque jalon, Enedis ou le GRD vérifie que :
- La puissance contractuelle du palier est effectivement souscrite,
- La puissance soutirée maximale (Pmax 10’), majorée de 10 %, est supérieure au palier visé.
En cas d’écart, Enedis ou le GRD réduit les puissances des jalons suivants, ce qui ajuste à la baisse la puissance cible finale.
Les recommandations d’OMNEGY pour éviter les mauvaises surprises
Cette réforme modifie en profondeur la gestion contractuelle des raccordements :
- Les entreprises consommatrices d’électricité doivent auditer leurs consommations et trajectoires de charge, afin d’éviter des sous-dimensionnements futurs.
- Une planification long terme (5 à 10 ans) devient essentielle, particulièrement pour les projets électro-intensifs, les data centers ou les infrastructures de recharge.
- La contractualisation d’une trajectoire de montée en charge progressive doit être envisagée pour sécuriser des capacités futures tout en optimisant les coûts.
- L’anticipation est clé : une demande tardive d’augmentation sera traitée comme un nouveau raccordement, avec des coûts importants et sans abattement (pour les nouveaux contrats).
Conclusion
Le mécanisme de réajustement automatique des puissances de raccordement représente un tournant majeur pour les consommateurs en HTA et HTB. En réallouant les capacités de manière plus efficiente, il répond à l’urgence d’optimiser le réseau électrique national, mais impose aux entreprises une discipline accrue dans la gestion prévisionnelle de leurs besoins énergétiques.
Dans ce nouveau cadre, les entreprises doivent impérativement projeter leurs trajectoires énergétiques sur 10 ans et sécuriser leurs droits de raccordement en conséquence.
Spécialiste des contrats d’énergie, OMNEGY accompagne ses clients industriels, data centers, opérateurs d’infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE) et tertiaires dans l’analyse fine de leurs puissances, l’optimisation de leurs contrats d’énergie et la définition de trajectoires de montée progressive adaptées.