Depuis la loi « Climat et Résilience » de 2021, la France a mis en place les Certificats de Production de Biogaz (CPB) afin de soutenir la filière biométhane injecté dans les réseaux.

L’objectif principal des CPB est d’atteindre une part de 10 % de biométhane dans le mix gazier d’ici 2030, en créant une mécanique incitative pour les producteurs (soutien aux nouvelles installations et aux unités existantes arrivant en fin de contrat d’achat) et contraignante pour les fournisseurs de gaz.

Depuis 2024, les évolutions réglementaires successives (décrets, arrêtés) ont précisé la mise en œuvre pratique des CPB, notamment en fixant les obligations croissantes des fournisseurs pour les années 2026 à 2028 et en adaptant les coefficients applicables selon l’ancienneté des installations. Ces dispositifs s’inscrivent dans une volonté plus large de décarbonation des usages gaz et d’optimisation de la valorisation des déchets organiques par méthanisation.

Qu’est-ce qu’un Certificat de Production de Biogaz (CPB) ?

Un CPB est un titre représentant 1 MWh (en Pouvoir Calorifique Supérieur ou PCS*) de biométhane injecté dans le réseau. Il sert à prouver qu’un producteur a effectivement injecté du biométhane, et qu’un fournisseur doit disposer (ou restituer) un nombre minimal de certificats en fonction de ses volumes de gaz vendus aux clients résidentiels et tertiaires sur l’année écoulée.

* Pouvoir Calorifique Supérieur (PCS) : le PCS mesure la quantité totale de chaleur libérée par la combustion complète d’un combustible, incluant l’énergie issue de la condensation de la vapeur d’eau dans les émissions. En France, le PCS moyen du biométhane injecté dans les réseaux se situe autour de 10,7 kWh/m³ (GRDF, données 2024), équivalant à environ 1 MWh PCS pour 93,5 m³ de biométhane.

A quoi servent les Certificats de Production de Biogaz (CPB) ?

Les Certificats de Production de Biogaz (CPB) constituent un levier essentiel pour encourager l’injection de biométhane dans les réseaux gaziers français. En associant à chaque mégawattheure (MWh PCS) de biométhane injecté un titre valorisable, ils permettent aux fournisseurs de gaz de prouver qu’ils soutiennent directement la production d’énergie renouvelable.

Ce mécanisme vise à sécuriser un revenu complémentaire pour les unités de méthanisation, à renforcer la traçabilité du biométhane et à accompagner l’atteinte des objectifs de transition énergétique fixés par la loi Climat et Résilience.

Le fonctionnement des Certificats de Production de Biogaz (CPB)

Les acteurs

Le marché des CPB s’articule autour de trois catégories principaux d’acteurs :

  1. Les producteurs de biogaz qui sont les exploitants d’unités de méthanisation ou d’installations de stockage de déchets non dangereux (ISDND) injectant du biométhane dans les réseaux de gaz naturel (GRDF, GRTgaz).
  2. Les fournisseurs de gaz qui regroupent l’ensemble des entreprises titulaires d’une autorisation d’exploitation de transport ou de distribution de gaz. Les fournisseurs sont soumis à une obligation de restitution annuelle de CPB en proportion de leurs ventes.
  3. Les consommateurs de gaz et tiers qui sont les entreprises ou organismes souhaitant valoriser ou consommer du biométhane vert, pouvant acheter des CPB pour garantir l’origine renouvelable de leur approvisionnement.

A côté de ces acteurs, on retrouve :

  1. Les traders et intermédiaires : sociétés de négoce spécialisées qui facilitent la transaction de CPB sur le marché secondaire.
  2. EEX (European Energy Exchange) : gestionnaire du registre et de la plateforme d’échanges. Le registre national des CPB assure la transparence, la traçabilité et la comptabilité des CPB émis, transférés et annulés. L’accès au registre est réservé aux acteurs autorisés, suivant une procédure d’enregistrement définie par l’EEX.

Le mécanisme des CPB

Le mécanisme des CPB se décompose en plusieurs étapes :

  1. Émission des CPB
  • Producteurs éligibles :
    • Installations de méthanisation (agro-industrielle, agricole, ISDND, station d’épuration, etc.) situées en France métropolitaine.
    • Doivent produire du biométhane conforme à la norme NF EN 16723-2 et l’injecter dans le réseau de gaz naturel (GRDF ou GRTgaz).
  • Processus d’émission :
    • Le producteur s’enregistre sur le registre national des CPB (EEX).
    • Il déclare mensuellement ou trimestriellement les volumes de biométhane injectés (en m³), convertis en MWh PCS via le PCS mesuré (en kWh/m³).
    • Les gestionnaires de réseau vérifient la qualité du gaz (analyse de composition) et valident les volumes injectés.
    • EEX émet le nombre de CPB correspondant, en appliquant le coefficient de modulation si l’installation a plus de 15 ans (Coefficient = 0,8 ou 1 selon l’ancienneté).
  1. Transfert et négociation sur le marché
  • Les CPB sont des titres transférables. Chaque titulaire de compte (producteur, fournisseur, trader) peut acheter/vendre des CPB sur le marché secondaire via la plateforme EEX.
  • Les échanges se font sous la forme d’enchères ou de transactions bilatérales : le prix résulte de l’équilibre offre-demande.
  • Entre 2022 et 2024, le prix moyen d’un CPB a fluctué entre 8 € et 18 €, avec des pics fines de saison (novembre 2023 : 22 €) lorsque le volume de CPB disponibles était limité face aux obligations croissantes.
  • Les variables influençant le prix :
    • Taux d’injection (augmentation du nombre d’installations en service).
    • Évolution des obligations réglementaires (coefficient 2027 et 2028).
    • Variations saisonnières de la production (saison automne/hiver plus propice à la méthanisation).
  • Perspective à moyen terme : avec la montée en charge des objectifs (3,1 TWh PCS en 2027, 6,5 TWh PCS en 2028), l’offre devrait progresser (nouvelles unités), mais la demande croissante des fournisseurs pourrait maintenir le prix autour de 15-20 €/CPB en 2026-2028 (EEX, rapport 2024).
  1. Restitution et annulation
  • À la fin de chaque année civile, chaque fournisseur (gaz naturel, GPL, gaz propane) doit restituer un nombre minimal de CPB proportionnel à ses ventes de gaz auprès des consommateurs résidentiels et tertiaires.
  • Le coefficient d’obligation est fixé par le décret 2024-625 :
Année Objectif de production (TWh PCS) Coefficient d’obligation (CPB/MWh PCS vendu)
2026 0,8 TWh 0,0041
2027 3,1 TWh 0,0182
2028 6,5 TWh 0,0415
Fournisseurs : calculer la quantité de CPB à restituer

Fournisseurs : calculer la quantité de CPB à restituer

  • Le fournisseur restitue les CPB via le registre EEX : les certificats sont alors annulés (mise à zéro du solde). En cas de manque, il s’acquitte d’une pénalité de 100 € par CPB manquant.
  1. Modalités spécifiques pour les installations > 15 ans
  • Un coefficient de modulation de 0,8 est appliqué aux installations mises en service depuis plus de 15 ans au moment de la déclaration.
  • Exemple : une unité de méthanisation mise en service en 2006 injectant 10 000 MWh PCS en 2026 ne recevra que 8 000 CPB (au lieu de 10 000).
Calculateur de CPB (Production)

Producteurs de biogaz : calculer le nombre de CPB à émettre

  1. Expiration et suivi
  • Les CPB ont une durée de validité de 36 mois à compter de la date d’émission. Après cette période, les certificats non restitués expirent automatiquement.

Avantages, enjeux et contraintes des Certificats de Production de Biogaz

Le tableau ci-dessous présente, de manière synthétique, les principaux avantages, enjeux et contraintes liés aux CPB pour chacun des acteurs concernés : producteurs de biométhane, fournisseurs de gaz et consommateurs finaux. Il met en lumière les bénéfices financiers et environnementaux, les défis réglementaires à anticiper, ainsi que les limites opérationnelles inhérentes au dispositif :

Parties prenantes Avantages Enjeux Contraintes
Producteurs
  • Revenu complémentaire : chaque MWh PCS injecté génère 1 CPB (ou 0,8 CPB si > 15 ans). Permet d’améliorer la rentabilité des unités de méthanisation.
  • Sécurisation financière : anticipation des recettes sur 10-15 ans amortit les investissements (500 €/kW – 1 000 €/kW).
  • Visibilité pour les financeurs : existence d’un mécanisme de revenu garanti, réduisant le coût de financement.
  • Maintenir la qualité du biométhane
  • Taux d’utilisation optimal : maximiser la disponibilité (souvent > 8 500 h/an) pour recevoir un maximum de CPB.
  • Stratégie d’investissement : caler les extensions ou rénovations pour éviter le coefficient 0,8 (après 15 ans).
  • Investissement initial élevé : coûts de construction et frais de mise à niveau
  • Contraintes administratives : procédure d’enregistrement, audits, déclarations régulières.
  • Risque de modulation : installations > 15 ans voient leur CPB réduits (0,8).
  • Dépendance aux prix du marché : vente de CPB soumise à la volatilité (8 €–20 €/CPB).
Fournisseurs
  • Flexibilité d’approvisionnement : possibilité d’acheter des CPB sur le marché ou via des contrats long terme.
  • Image verte : capacité d’offrir une part de biométhane « certifié » aux clients (avantage concurrentiel).
  • Anticipation des coûts : planification budgétaire possible via des couvertures de prix.
  • Gestion du portefeuille CPB : arbitrage entre achats sur le marché (spot vs long terme).
  • Maîtrise des risques règlementaires : anticiper l’évolution des coefficients et des objectifs législatifs.
  • Positionnement stratégique : choix entre taux de couverture maximal et optimisation des coûts de revient.
  • Obligation croissante : passage de 0,0041 CPB/MWh PCS en 2026 à 0,0415 en 2028 (multiplication par 10).
  • Risques de pénalité : 100 €/CPB manquant, pouvant représenter plusieurs millions d’euros pour les grands fournisseurs.
  • Volatilité des prix : tension offre/demande peut faire flamber le coût des CPB.
Consommateurs
  • Accès à du gaz plus « vert » : transparence accrue grâce aux étiquettes d’origine (GO) et aux CPB. Possibilité de suivre la part de biométhane dans leur consommation.
  • Effet local : soutien à l’économie circulaire et aux agriculteurs/producteurs locaux.
  • Contribue à la transition : réduction de l’empreinte carbone (jusqu’à – 75 % d’émissions par rapport au gaz fossile).
  • Information et sensibilisation : comprendre la différence entre CPB, GO, BPA. Choix d’une offre en fonction de leur volonté d’impact environnemental.
  • Suivi des évolutions règlementaires : identification des labels fiables, vérification des reportings annuels.
  • Risque de répercussion tarifaire : les coûts des CPB peuvent être partiellement répercutés sur la facture de gaz (estimation : + 2 € – 3 €/MWh en 2024).
  • Offres limitées : tous les fournisseurs ne disposent pas d’un portefeuille CPB suffisant, limitant le choix.
  • Complexité technique : nécessité de comprendre le mécanisme de conversion PCS ↔ CPB et la lecture des étiquettes.

Quelles sont les différences entre CPB, Garanties d’Origine et Biogas Power Agreement (BPA) ?

Le tableau ci-dessous compare les CPB aux Garanties d’Origine (GO) et aux Biogas Power Agreements (BPA). Cette mise en perspective permet de comprendre les différences de coût, d’engagement, de flexibilité et de finalité entre ces trois dispositifs, ainsi que les critères à prendre en compte pour opter pour l’une ou l’autre solution.

Critères CPB Garanties d’Origine (GO) Biogas Power Agreement (BPA)
Objectifs
  • Obligations réglementaires pour les fournisseurs de gaz.
  • Traçabilité de l’origine renouvelable du biométhane (non-obligatoire pour le fournisseur).
  • Contrat commercial hors cadre réglementaire : achat direct de biométhane (ou électricité biogaz) entre producteur et consommateur.
Durée d’engagement
  • Variable, flexible (annuelle)
  • Flexible : émission valable jusqu’à la consommation (1 an généralement).
  • Long terme : généralement 5 à 20 ans selon la taille et l’investissement du projet.
Coût
  • Prix de marché volatile (8 €–20 €/CPB), pénalité 100 €/CPB manquant.
  • Prix modéré (2 €–5 €/GO selon le mix gazier du fournisseur), sans pénalités.
  • Négocié librement (typ. 5 €–15 €/MWh PCS pour biométhane) : inclut prime d’investissement et frais d’exploitation.
Flexibilité
  • Moyenne : obligation annuelle, dépend des objectifs réglementaires.
  • Élevée : peut être couplée ou non à l’offre commerciale; aucun volume minimal imposé.
  • Limitée : engagement contractuel fixe sur volumes et prix; peu de flexibilité pour ajustement en cours d’année.
Contraintes
  • Suivi réglementaire strict, audits ; coût potentiel des pénalités.
  • Nécessite seulement une traçabilité administrative, pas d’obligation de restitution.
  • Négociation complexe ; volumes fixes, juridique important, risque de prix face aux fluctuations du marché.
Complémentarité
  • Avec GO : un CPB peut être valorisé en GO si produit en même temps.
  • Avec CPB : un biométhane certifié GO ne garantit pas la conformité réglementaire CPB.
  • Avec CPB : un BPA peut inclure la cession de CPB au fournisseur pour combler ses obligations.
Acteurs visés
  • Producteurs, fournisseurs de gaz, traders.
  • Fournisseurs, consommateurs finaux (volontaires).
  • Producteurs, consommateurs industriels/entreprises cherchant une fourniture verte à long terme.

Conclusion

Le mécanisme des Certificats de Production de Biogaz (CPB) constitue aujourd’hui un levier incontournable de la transition vers un mix gazier décarboné en France. Grâce à un cadre réglementaire précis (lois, décrets, arrêtés), la filière biométhane bénéficie d’un soutien financier structuré, permettant la viabilité économique des installations de méthanisation.

À l’horizon 2026-2028, l’augmentation progressive des objectifs de production et des coefficients d’obligation va intensifier la dynamique du marché des CPB. Les producteurs disposent d’un revenu sécurisé, à condition de respecter les normes de qualité et les exigences de traçabilité. Les fournisseurs doivent, quant à eux, anticiper la hausse de leurs obligations et optimiser leurs stratégies d’achat pour limiter les risques de pénalités. Enfin, les consommateurs peuvent s’engager dans une consommation plus responsable, mais devront accepter un léger surcoût tarifaire et s’informer sur les différentes garanties de traçabilité (CPB, GO, BPA).

Le registre national (EEX) reste la pierre angulaire de ce système : il garantit la transparence, la traçabilité et l’équilibre entre l’offre et la demande. À plus long terme, l’objectif est d’atteindre une maturité suffisante du marché pour stabiliser les prix des CPB autour de 15 €–20 € d’ici 2028, en cohérence avec l’essor des unités de production de biométhane.

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Spécialiste des contrats d’énergie, les experts en méthanisation d’OMNEGY accompagnent les producteurs de biométhane et les fournisseurs de gaz naturel dans la contractualisation de Certificats de Production de Biogaz.

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